Joyeuses pâques!

Nous voici repartis pour de nouvelles aventures… Cette fois, nos récits prendront la forme d’un simple journal de bord, au jour le jour. Juste la transcription de mon carnet de notes, histoire de ne pas oublier les moments clés.

Marie-Paule



Samedi 11/4

Dugroin nous apporte un sac à viande en polaire, souvenir du Népal, juste avant notre départ vers la gare. Il s’avérera bien utile en altitude.

Décollage du charter Sobelair à 12h55. La compagnie fête ses 50 ans, les hôtesses sont d’époque. Je me surprends à repenser au film Jackie Brown.

C’est la drache à la sortie de l’avion. Mise en condition directe. Pour amoindrir les désagréments météo, nous louons une petite auto chez Europcar : c’est une Fiat Punto rouge qui sent le neuf : elle a 1843km au compteur.

La mauvaise réputation décrite dans le Routard nous fait fuir au plus vite le centre ville de Catane. Nous sommes mis directement dans l’ambiance : toutes les voitures passent au feu rouge et il nous faut nous plier aux mœurs locales.

Autre mise en condition directe : une signalisation plus que surprenante : de beaux grands panneaux directionnels et puis tout d’un coup, plus rien ! Trekt U plan ! Après quelques essais infructueux sur base de la carte, nous nous dirigeons au feeling : après tout, pour l’Etna, tant qu’ça monte, c’est qu’ c’est bon.

Nous arrivons en fin d’après-midi à Nicolosi dans cette Auberge de Jeunesse déjà appréciée en octobre 97 par la folle équipe des joyeux géologues. Tout y brille et sent le Monsieur Propre local ... mais tout se fait exclusivement en italien ... et c’est parti : "vorei una camera per ...."

Coucher de soleil sur un petit village comme on l’aime. Samedi de Pâques animé aux alentours de l’église à l’heure sacrée de la passagiata. Ruelles minuscules, léprosées et voitures de circonstance; beaux habits, téléphones portables et tout ce qu’il faut pour briller.

Le repas du resto du Belvédère, pourtant conseillé, tant par le Routard que par nos joyeux géologues s’avère quelconque ... mais le pichet est offert par la maison.

La nuit s’anime au rythme des feux d’artifice.


Dimanche 12



Soleil et ciel bleu. Nous fonçons vers le refuge de Sapienza. Un routard allemand qui sent le souffre de Volcano nous accompagne.. eh, oui, pendant le long week-end pascal, aucun bus ne monte .. rien que pour ça, l’investissement de la location de la voiture valait le coup.

Le téléférique de Sapienza ne fonctionne pas : trop de vent. Ce sont des bus 4X4 qui nous prennent en charge. Une heure d’attente.

Grosse et mauvaise surprise au sommet : c’est la tempête. Il y fait -10°c, tous les touristes sont entassés dans la cabane des guides. Le vent violent et glacial sculpte des cristaux de neige sur chacun des blocs de lave ... de jolies plumes s’y dessinent.

Impossible de retrouver le sympathique Antonio Nicoloso, chef de guides de l’Etna : emmitouflés, ils se ressemblent tous et aucun ne veut se prononcer sur la météo.

Puisque le vent déchirerait notre tente et que, de toute façon, nous ne voyons pas à 10m, nous redescendons à pied et pique-niquons des antipasti prévus pour la nuit.

Le souper au Toucan ne compense pas la déception de l’ascension : les antipasti ne sont plus à volonté, les funghi porcini (Cèpes de Bordeaux) sont 3 minuscules champignons de Paris.



C'était la glace qui nous attendait au sommet...


...et une visibilité quasi nulle!
Lundi 13

Ciel bleu, soleil, mais l’Etna est couvert d’un chapeau plat et allongé ... le vent ne s’est pas calmé.

Nous partons jouer les touristes à Syracuse. Les panneaux indicateurs toujours aussi surprenants nous font faire deux fois le tour du "periféria" de Catane.

Deux heures de bouchon pour ce lundi de Pâques, record battu. Nous voici vraiment intégrés dans la population locale.

Peu friands de visite de site archéologique, nous allons nous balader dans Ortigia, la vieille ville. Des petites ruelles fraîches, du linge qui pend, des fleurs au balcon ...bref, comme dans les films. Près du Duomo, église baroque (de briques et de broc comme dit le Routard), des vendeurs de jus d’oranges sanguines frais ... Nous faisons un détour pour aller voir la fontaine d’Aréthuse, résurgence naturelle à 5 m de la mer. Le Routard nous raconte une belle légende: "C’era una volta, une jolie nymphette avait l’habitude de faire trempette dans les eaux de l’Alphée. Le fleuve se mit à fantasmer comme un fou. Pour lui échapper, la nymphette implora Artémis, protectrice de la virginité, de faire quelque chose. Celle-ci la transforma en source et la fit réapparaître dans l’île d’Ortygie. L’apprenant, Alphée traversa à son tour la mer et la rejoignit pour mêler ses eaux aux siennes.". (JL s’est demandé si cela n’avait pas donné son nom aux fontaines artésiennes, mais non, celles-ci viennent de l’Artois.)

Le long du Parc, nous dégustons les meilleures gelati de notre voyage : quel goût crémeux pour ces arômes de pistachio, gianduja, toron, tiramisu, fragola.

Sur la route moins bouchonnée du retour, tout sent bon les citronniers. Mais les panneaux nous font tourner longtemps dans Catane ... apparemment suffisamment longtemps que pour se faire repérer.

A un carrefour encore plus mort que les autres, une Vespa bloque la voiture et le passager se rue sur ma porte en essayant de l’ouvrir. JL appuie sur l’accélérateur. Ma porte était fermée et les malfrats mal préparés ... mais ces quelques secondes me feront broyer beaucoup d’idées noires pendant trois jours ... et s’ils avaient ouvert la porte, que serait-il arrivé ? Le Corvo, le vin rouge sicilien ne suffit pas à me faire trouver le sommeil.



Syracuse moderne


Les jus d'oranges pressées de la piazza del duomo
Mardi 14

Un cappuccino d’enfer nous remet d’aplomb.

Un petit tour au syndicat d’initiative de Nicolosi où le célèbre employé à la tête de Hamster Jovial nous offre quelques bonnes cartes, histoire de se balader autour de l’Etna en attendant que le sommet se dégage.

Dans la région des "monte Vetore", à mi-chemin entre Nicolosi et le sommet (+- 8 km du sommet), JL découvre de très légers morceaux de lave, probablement issus de l’éruption de la nuit du 27-28 mars (fontaine de lave de 300m pendant deux heures).

Les châtaignes récoltées pendant notre balade constituent un excellent pique-nique .. un peu un air de Corse, comme ça. Mais, après tout, c’est pour ça que Catane porte son nom.

Un détour par le charmant village d’Adrano, histoire de ne rater aucune opportunité de gelati. Pour ma part, je teste une boisson à base d’eau pétillante, de sirop d’amande et de jus de citron frais. Retour bercé par l’odeur enivrante des vergers d’agrumes. Seul à Chypre nous avions déjà pu percevoir une odeur aussi forte.

Comme d’hab., tours injustifiés dans différents villages, dus à la signalisation surprenante, portes fermées, sans respirer, en essayant de passer inaperçu. Une bonne carte Michelin aurait-elle permis d’éviter ces désagréments ?



Balade aux environs des Monte Vetore
Mercredi 15

L’Etna semble dégagé. Nous tentons enfin une deuxième ascension. C’est bon signe : le téléphérique fonctionne et il y a nettement moins de monde dans la file.

A Torre del Filosofo, un vieux guide sympa qui parle français nous donne son "OK" pour planter la tente : c’est le premier jour de bon temps depuis 9 jours. Il a la couleur d’Antonio, l’odeur d’Antonio mais selon JL, ce n’est qu’un ersatz du, ô, grand chef des guides de l’Etna, Antonio Nicoloso le bien nommé.

Quelques mètres sur la lave, hors des sentiers touristiques et me voici déjà réconciliée avec la Sicile ... oh, oui, ça valait la peine.

Nous plantons la tente vers 11h30. Il est assez difficile de trouver un endroit à la fois à l’abri du vent, en dehors des névés et qu’on puisse retrouver la nuit. Nous nous installons finalement juste en dessous du cône de 1971, à la pointe de la coulée. Pas moyen de planter le 4ème piquet : nous sommes sur une grosse bombe.

Un petit tour de reconnaissance des cratères principaux : la Bocca Nuova et la Voragine. JL complète son carnet de terrain et note tous les changements depuis octobre 97 :

  • Le Cratère Sud Est, près duquel nous sommes installés présente de nombreuses coulées fraîches sur son flanc (nous le voyons du sud ouest)
  • La Bocca Nuova laisse entrevoir, entre les fumées, deux cônes plus imposants, mais surtout le cône ouest complètement effondré.
  • La Voragine présente une nouvelle bouche éruptive: un trou d’une dizaine de mètres de diamètre situé près de la séparation Voragine / Bocca Nuova. Celui-ci crache toutes les dix minutes.

Nous sommes une dizaine de fous passionnés à avoir fait ce jour l’ascension. Des grands "bonjour", quelques sourires, un mot d’encouragement avant le sommet ... nous sommes bien loin de l’autoroute à tourisme de masse.

Nous rentrons à la tente par un chemin enneigé assez amusant. Les cristaux de glace si étranges créés par la tempête brillent maintenant au soleil.

JL profite de l’après-midi de repos au camp pour renforcer les supports de la tente, ce qui s’avérera vital.

Une soupe sur le réchaud avant le départ vers 18h00 vers le cratère Sud Est. Nous crapahutons dans la cendre ... très amusant mais attention aux yeux sensibles et aux porteurs de lentilles !

Face au cratère, le vent violent nous empêche de nous tenir debout. Pour observer, nous nous couchons donc ... sur des fumerolles ... personnellement, je trouve ça assez effrayant, mais ça tient chaud ! Le cratère Sud Est est en pleine forme : je compte un joli souffle à chaque seconde ... c’est le 21 juillet toute la nuit. JL fait des tas d’essais de poses B. Je m’emballe dans le sac de couchage.... ce n’est pas du luxe.

Lorsque nous en avons tout notre saoul, une descente géniale dans la cendre nous attend ...géniale aussi parce que c’est la première fois que nous disposons d’un éclairage adéquat. Notre check-list de routard devient de plus en plus complète ... mais c’est décidé, la prochaine fois, je m’achète des guêtres.

Nous fêtons notre retour au camp luxueux par une soupe et une Chimay ... tempérée mais contenant des glaçons, c’est stupéfiant !

Une nuit évidemment sans sommeil à écouter ce vent violent qui secoue continuellement la tente.



Le bus 4x4 pour l'accès au sommet


La tente dans la cendre







La bocca nuova





Une petite soupe avant la nuit...


...et le spectacle du cratère Sud-Est


Nuit dans la tente, sous les étoiles et le volcan.

Jeudi 16

Après le remballage venteux, nous allons dire un petit bonjour à Antonio au Torre del Filosofo et lui résumons la nuit. Quel gars sympa qui aime partager sa passion!

Des téméraires ont passé la nuit à l’extérieur, dans leur sac, sur le béton du Torre del Filosofo ... mais comme à 10h30, ils sont toujours complètement emballés, nous nous imaginons facilement la douce et calme nuit qu’ils ont pu vivre.

Descente à pied jusqu’au téléférique de la Montagnola. Nous faisons signe aux bus qui montent, d’un petit sentiment de fierté "I did it"...

Un merveilleux Cappuccino au refuge. Un délicieux sentiment de bien-être, un peu vaseux de la nuit, pas très propre, un peu cassé partout, mais les poumons remplis d’air pur et les yeux de feu d’artifice. C’est curieux d’être confrontés à ce moment aux touristes tout frais qui montent en groupe et sans effort pour une observation de 10 minutes d’un sommet dans les nuages. JL se rappelle des circonstances similaires, lors de son arrivée à l’Aiguille du Midi après une traversée de la Vallée Blanche.


Vendredi 17

La gorge serrée, il nous faudra bien affronter Catane aujourd'hui si nous voulons offrir à Boris les bières et les chocolats que nous avons spécialement exporté à son attention. Et Boris les mérite bien, puisque ce brave doctorant en volcanologie allemand, délégué à l’université de Catane, gère le très bon site "ITALY’S VOLCANOES The craddle of volcanology" et donne régulièrement des nouvelles personnalisées de la situation etnéenne à Jean-Louis.

Nous camouflons les bagages dans le coffre, quittons Nicolosi, par un détour à la si typique poste du village, où une longue file de petites gens viennent encaisser leur chèque. Et ensuite un dernier délicieux cappuccino près du syndicat d’initiative, où nous sommes déjà connus.

Descente jusqu’à Catane, les explications sommaires du gars de l’auberge nous sont vitales : tout droit et à la 2ème place à gauche pour le Corso Italia. Toutes fenêtres fermées malgré la chaleur étouffante, portes bloquées, sans respirer, nous tournons longtemps dans cette ville où les places de parking sont plus rares que l’eau à Gorom-Gorom.

Finalement assez bien parqués, je note consciencieusement le nom de ces ruelles et avenues qui sentent bon la Méditerranée : Via Gabriele D’Annunzo, Via Vincenzo Giuefrida, ...

Sans flâner, nous allons au plus court vers l’université, un grand et vieux bâtiment sur une des avenues principales de Catane. Nous entrons sans problème et sans nous annoncer une seule fois; poseur de bombes, attention ! Un étudiant nous conduit jusqu’au bureau de Boris : 4 étages de larges escaliers monumentaux, des cartes et des cailloux partout mais, déception, Boris n’est pas là ... les recevra-t-il nos spécialités belges un jour ?

Heureuse de retrouver la voiture en un seul morceau, nous fuyons la ville pour parcourir près de 400 km en direction de Palerme. La plus belle autoroute de l’île, parmi les effluves d’orangers et par-ci, par-là, de jolis cabanons abandonnés et des moutons. Un ciel gris mais lumineux accompagne notre traversée de la plus grande île de la Méditerranée.

Nous arrivons à Calatafimi, village sélectionné par JL pour le retour à cause de sa proximité de l’aéroport de Punta Raisi (sans passer par Palerme!) et de Ségeste, "un des symboles archéologique de Sicile". Le parcours de la rue principale (panneau "Centro") mérite d’être le sujet d’un film à sensation au Futuroscope de Poitiers : les sens interdits se succèdent, et les passages trop étroits que pour laisser passer notre immense Fiat Punto .. nous n’avons donc pas essayé les rues secondaires. L’hôtel conseillé par le routard et si bien indiqué à la sortie de l’autoroute est introuvable .. ah, ces indications siciliennes , grrrr !

Après moultes demandes de chemin, nous nous installons et profitons de la fin d’après-midi pour nous camoufler parmi les touristes dans les ruines du temple et de la ville antique de Ségeste.

Nous terminons notre semaine en beauté par 4 plats de pâtes à l’hôtel.


Samedi 18

Départ de Calatafimi à 6h30. Il a plu, nous pourrons rendre la voiture propre.

 

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Dernière mise à jour : 04 nov. 1998